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Poules de réforme – Partie 1

Nathalie tient le compte Instagram My Backyard Paradise. Avec l’aide de son mari et de ses trois filles, elle s’occupe de sa « petite ferme de jardin » chez elle en Belgique. Les magnifiques photos qu’elle partage avec ses followers en témoignent : il s’agit bien d’un petit paradis. En juin 2018, elle décide d’agrandir sa ferme en y ajoutant trois poules de réforme, ces poules sauvées de justesse de l’abattoir. Suivez son aventure grâce au double album-photo qu’elle a tenu spécialement pour nous !

S’il nous manquait quelque chose dans notre ferme, c’était bien une poule pondeuse capable de pondre ses 300 œufs par an. En automne, nos poules pur-sang n’ont pas été très productives. Elles préféraient passer du temps à revitaliser leur plumage, attendant que les jours se rallongent pour se remettre à pondre. L’an dernier, on n’a pas eu d’œuf pendant plus de trois mois alors qu’on avait dix poules ! Il fallait se rendre à l’évidence : si on voulait des œufs en automne, on avait besoin de poules pondeuses.

Pour nous procurer nos poules, on passe systématiquement par des éleveurs amateurs ou un petit commerçant, ce qui nous permet de voir les poules et leurs conditions de vie : on peut vérifier qu’elles aient accès à de l’herbe, de l’eau fraîche et un habitat décent. Malgré tout, on aime bien l’idée de sauver des poules de l’abattoir et de leur donner une seconde vie dans notre jardin. En batterie, les poules ne vivent pas plus que 16 mois car leur corps a ensuite besoin de se reposer, ce qui veut dire qu’elles arrêteront de pondre et entraînent une perte pour l’industrie. En plus de ça, la production d’œufs diminue également à chaque mue, ce que les industriels ne tolèrent pas !

C’est donc ce qu’on a fait. La première étape fut de trouver un organisme permettant de sauver des poules de réforme. On a d’abord pensé à passer par www.redeenlegkip.be (‘Sauvez une poule de batterie’), un site belge qui permet d’acheter ou d’adopter une poule pondeuse. Si vous en adoptez une, vous versez une contribution mensuelle de 5€ et vous avez 24 œufs par mois en retour. Si vous en achetez une, ils la récupèrent avant qu’elle ne parte pour l’abattoir et lui prodiguent les premiers soins si nécessaire. Cependant, on voulait s’occuper des poules nous-mêmes. En poursuivant mes recherches, je suis tombée sur un autre site belge, www.lespoulesheureuses.org (également actif en France depuis peu). Avec eux, vous allez récupérer vous-même votre poule, ce qui vous permet d’avoir l’adresse et le code (qui apparaît sur les œufs) de la société.

On a ensuite dû attendre le bon moment. Il vaut mieux sauver une poule pendant une période de l’année où elle pourra facilement récupérer. En général, les poules de réforme n’ont pas beaucoup de plume et certaines ne sont jamais sorties de leur grange, dans laquelle la température descend très rarement en-dessous de 18°C ! La plupart n’ont jamais connu la pluie, donc il ne faut pas trop les brusquer avec les éléments – elles peuvent être très sensibles au vent ou aux courants d’air. Elles ont déjà eu des conditions de vie difficiles, si en plus elles tombent malades…

Semaine 1

16 juin Finalement, en 2018, j’ai franchi un cap. J’ai réservé trois Isa Brown dont les œufs étaient marqués du chiffre 2, c’est à dire qu’ils étaient certifiés comme « issus de poules élevées au sol ». Et là, vous vous dites « comment ça, des poules élevées au sol ? »

Dans l’industrie, cette dénomination, bien que n’étant pas la « pire » (le chiffre 3 indique des poules de batterie), désigne des poules ayant passé leur vie à l’intérieur d’une grange ou d’un entrepôt. Elles ont des perchoirs, des pondoirs, des griffoirs et le sol est recouvert de paille. Il y a maximum neuf poules par mètre carré et le débecquage y est autorisé. Pour des poules « en liberté » (car elles sont techniquement libres), on est bien loin de conditions de vie optimales…

Ma fille de 9 ans m’a accompagnée pour aller récupérer les poules. Je l’ai prévenue avant d’arriver qu’elles risquaient d’être en mauvaise santé, qu’elles ne ressembleront pas à celles qu’on a chez nous, qu’elle ne pourra pas les prendre dans ses bras pour leur faire des câlins et qu’on devra s’occuper d’elles en priorité. En arrivant sur place, on s’est aperçu qu’on n’était pas les seuls à venir acheter des poules : un couple de personnes âgées sont venus prendre deux poules et un homme avec une cinquantaine de cages était également présent. Après nous, les gens continuaient d’arriver. Je finis par demander à un membre du personnel si on peut avoir trois poules. Il a vu que j’étais avec ma fille et est parti nous les chercher. On a bien entendu interdiction d’entrer dans l’entrepôt ou de le prendre en photo. Les trois poules qu’on nous a ramenées avaient meilleure allure que celles qu’avait récupérées le couple avant nous – les nôtres ont encore beaucoup de plumes. Peut-être que le vendeur ne m’aurait pas donné ces poules s’il n’avait pas vu ma fille, ce qui m’aurait permis de me faire une impression peut-être plus honnête des conditions de vie des poules de réforme. Après avoir payé 3€ par poule, leur nouvelle vie va enfin commencer. Chez moi, tout était prêt pour les accueillir. Après dix minutes de route, on s’est regardé, ma fille et moi : il y avait une odeur dans la voiture. Pas l’odeur classique de fumier, plutôt une odeur chimique, synthétique. Les poules ne faisaient pas un bruit, j’espérais qu’elles allaient survivre à un trajet d’une heure en voiture…

Une fois chez nous, on les a inspectées méticuleusement. Elles étaient paralysées… Étaient-elles transites de froid ? De peur ? Elles avaient encore des plumes mais leur plumage était terne, moins brillant que celui d’une poule en bonne santé. Leurs plumes étaient toutes emmêlées et celles de la queue n’avaient pas fière allure. Leurs yeux étaient blancs et leur crête très pâle. Leurs griffes étaient courbées et bien trop longues, et leurs pattes couvertes de purin : elles n’avaient visiblement pas eu le temps de bien se faire les griffes… Elles ont le bout du bec coupé et malheureusement cette opération très douloureuse a lieu quand la poule n’est qu’un poussin d’une dizaine de jours, simplement pour qu’elle ne s’arrache les plumes (ce que les poules font quand elles sont stressées, par exemple si elle ne peuvent pas chercher de la nourriture dans l’herbe).

La première chose à faire fut de les traiter contre les parasites comme les poux ou les vers. On utilise de la terre de diatomée, un produit naturel qui lutte contre tout type de parasites. Pour l’instant, elles devaient être mises en quarantaine. On les a donc installées dans notre Eglu Classic d’Omlet. Il est équipé d’un enclos de 2m et il se déplace facilement, ce qui nous permet de les faire se promener sur de l’herbe fraîche tous les jours. En plus, il se nettoie très rapidement. On a soulevé les poules délicatement hors de leur cage en surveillant de près leur premier contact avec de la pelouse. Elles avaient l’air surprises et sont restées immobiles pendant quelques minutes avant que l’une d’entre elles ne se rende compte qu’elle était capable de (et autorisée à) marcher. Lentement mais sûrement, elles ont commencé à explorer leur enclos. Pendant que les enfants les surveillaient, j’ai ajouté quelques gouttes de médicament à leur eau. On utilise de l’Avimite pour traiter les poux et les mites. Elles en prennent tous les jours pendant les sept premiers jours, puis une fois par semaine pendant cinq semaines. Elles ont fini par trouver leur abreuvoir et on aurait dit qu’elles n’avaient pas bu depuis plusieurs jours. D’habitude, on ne donne pas de granulés à nos poules donc j’ai dû m’en procurer car c’est la seule nourriture qu’elles aient connue de leur vie. Le soir venu, on les a aidées à rentrer dans leur Eglu pour qu’elles puissent passer la nuit en toute sécurité.

Quand j’ai ouvert la porte du poulailler le lendemain matin, elles n’ont pas voulu sortir. Au bout d’une heure, on les a sorties nous-mêmes et on a constaté qu’elles avaient déjà pondu trois œufs, deux sur les perchoirs et un dans le pondoir. Comme elles étaient sous médicament, impossible de manger leurs œufs pendant plusieurs semaines. C’est triste mais on ne peut pas vraiment prendre le risque… On les a donc jetés.

Elles ont passé le reste de la journée dehors assises dans la pelouse. Elles ont pu pour la première fois goûter l’herbe et les trèfles et on dirait qu’elles ont bien aimé ! Les deux nuits suivantes, on a dû les aider à nouveau à rentrer dans l’Eglu le soir mais après ça elles ont enfin compris que c’était leur nouvelle maison. Elles se sont mises à sortir toutes seules le matin quand je leur ouvre la porte. Au bout de quelques jours, elles ont pris l’habitude de pondre dans le pondoir. Leurs yeux s’éclaircissent de nouveaux et elles commencent à établir leur hiérarchie. Elles sont bien plus en forme que pendant les premiers jours mais elles ont encore du chemin à faire avant d’être en aussi bonne santé que nos autres poules. Bien qu’elles n’aient plus peur de nous quand on s’approche d’elles, on ne peut toujours pas les toucher. C’est assez dur pour les enfants qui ont très envie de les prendre dans les bras pour leur faire oublier leur douloureux passé… Mais elles doivent d’abord s’habituer à leur nouvel environnement, à leur nouvelle vie et à notre présence.

Semaine 2

Maintenant, on ne leur donne leur traitement anti poux rouges qu’une fois par semaine. On peut commencer à les vermifuger. Ce traitement doit être donné cinq jours de suite et peut lui aussi être dilué dans leur eau. Les poules pondent deux ou trois œufs par jour. Elles se sont faites à leur nouvel environnement, elles n’ont plus peur de nous ou de notre chien quand il s’approche d’elles pour les renifler. La hiérarchie et l’ordre des repas sont bien instaurés. Il est temps de changer leur régime alimentaire ! On veut le meilleur pour nos animaux, ce qui inclut un régime sain et équilibré. Nos autres poules ont du Garvo mais nos trois nouvelles recrues on besoin d’avoir un peu plus de nutriments et de vitamines. On leur donne de l’Alphamix, un mélange de graines très riche avec des granulés et des amphipodes. Mais quand je les mélange avec leurs granulés actuels, j’ai remarqué qu’elles faisaient le tri et ne touchaient pas à leur nouvelle nourriture. En revanche, elles mangent beaucoup d’herbe et de trèfles. Petit à petit, leurs crêtes reprennent des couleurs !

Ce week-end, notre fille cadette a décidé qu’il était temps de les laisser gambader en liberté dans le jardin. Elles adorent avoir plus d’espace et raffolent des bains de sable, mais c’est très compliqué de les faire rentrer dans leur Eglu… Même si elles finissent par y retourner d’elles-mêmes au bout d’un certain temps. Au moins, on a pu constater qu’elles ne sont pas tout à fait prêtes pour la vie en extérieur.

Revenez dans quelques semaines pour découvrir la deuxième partie de l’aventure de ces poules de réformes !

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